La Critique Sous-Marine – Volume 6 (2019)
Grosse actualité pour le sixième volet de La Critique Sous-Marine. Beaucoup d’artistes au talent émergeant ou déjà bien installés sur la scène rock, qui tous méritent un petit coup de projecteur. Le point géographique central de ce nouveau volume se situe dans les iles britanniques avec quelques échappées dans notre bel hexagone et dans les lointaines contrées de l’Afrique du sud.
ALASKALASKA – The Dots (2019)
Commençons avec le groupe phare de cette nouvelle sélection, les londoniens d’Alaskalaska, réalisateurs d’un premier opus au discours écolo-humanitaire sur fond de pop rayonnante, The Dots.
Douze titres aux harmonies aériennes et synthétiques, crossover de la pop, du jazz et du rock, magnifiés par le chant suave de Lucinda Duarte-Holman, voici le menu merveilleux que nous propose le quintette britannique.
The Dots est l’un de ces albums géniaux qu’il est difficile de ranger dans une case. Pour leur premier essai, les Alaskalaska frappent donc très fort et s’ouvrent un champ des possibles gigantesque pour la suite de leur carrière.
EPSYLON – Astronaute (2019)
Astronaute, déjà le cinquième album d’un groupe français qu’il serait enfin temps de voir sur le devant de la scène, Epsylon.
Sur un fond de sonorités celtiques et dans une très grande musicalité pop, le rock tonitruant sent la sueur et le soufre. Le sextette nantais ajoute une difficulté majeure à sa performance, le chant dans la langue de Molière, obstacle casse-gueule habilement contourné notamment sur les excellents C’est Pas Le Paradis et A L’avenir.
Ce lumineux Astronaute met sur orbite Epsylon et, espérons-le, devrait enfin permettre au combo hexagonal de tutoyer les étoiles.
THE NINTH WAVE – Infancy pt. 1 (2019)
Le duo écossais The Ninth Wave fait dans l’original pour la sortie de son exercice initial, Infancy. Un premier volet de six titres est sorti au printemps, la seconde partie du diptyque ne devrait voir le jour qu’à l’automne.
Le combo de Glasgow développe un style très british et très classique de post-punk et de new-wave, chanté alternativement par Haydn Park-Patterson et par Amelia Kidd. Le duo ne brille évidemment pas par son innovation musicale, mais plutôt par la conviction, la puissance et le talent mis dans l’interprétation de son rock.
Loin d’être des inconnus du monde indépendant, puisque déjà auteurs d’une bonne pelletée de singles, The Ninth Wave s’installe avec Infancy (à valider tout de même avec le second volet) à la table très prisée du gratin rock britannique.
YUGEN BLAKROK – Anima Mysterium (2019)
Ayant vu sa notoriété bondir après sa collaboration avec Vince Staples et Kendrick Lamar pour l’un des titres phares de la bande originale du film Black Panther, Opps, Yugen Blakrok revient aux affaires du hip-hop hardcore sur un second opus nommé Anima Mysterium.
La rappeuse de Johannesburg propose une musique apocalyptique mâtinée de dubstep et de trip-hop. Le flow glacial et monocorde de Yugen Blakrok ajoute un peu d’angoisse à ce style poisseux, digne de la fin du monde.
Il ne nous est pas souvent donné l’occasion de mettre à l’honneur, pour ce style musical très urbain, un artiste venant d’Afrique du sud, voire tout simplement d’Afrique. Réjouissons-nous alors de voir l’aura machiavélique de l’inquiétante Yugen Blakrok planer au-dessus de ce lointain continent.
CASSIA – Replica (2019)
Dans la veine de la pop caribéenne des américains de Vampire Weekend et de Cayucas, le trio britannique Cassia fait scintiller sur son premier opus, Replica, les couleurs harmoniques de l’Afrique.
Pour combattre la grisaille quasi permanente du ciel du comté de Cheshire, les anglais amalgament dans leur musique la chaleur du soleil tropical. A l’écoute des onze titres de Replica l’on est instantanément transporté vers une ile paradisiaque, avec pour tous accessoires, une chemise à fleur, un bermuda et bien sûr l’indispensable cocktail.
Ce style de pop sautillante est plutôt l’apanage des terres ensoleillées, mais Cassia n’en a cure, le trio anglais crée son propre microclimat torride et dansant au-dessus de la morne cité de Macclesfield.
THE MURDER CAPITAL – When I Have Fears (2019)
Avec ce patronyme provocateur, les irlandais de The Murder Capital ne cachent pas leur envie d’en découdre.
Leur premier album à venir, When I Have Fears, annoncé par la fureur post-punk des brulots Feeling Fades, Green & Blue et Don’t Cling To Life, devrait confirmer cette propension pour la violence musicale.
Dans le sillage des mythiques New Model Army ou plus récemment de l’Interpol des débuts, les dublinois préparent bruyamment leur ascension vers le sommet de la scène rock britannique.
TROPICAL MANNSCHAFT – To Be Continued… (2019)
Projet solo de Florian von Künssberg, par ailleurs membre du combo normand The Lanskies, Tropical Mannschaft sort aujourd’hui son second EP, To Be Continued…
Naviguant dans les ambiances cotonneuses et mélancoliques de l’electropop eighties, chères à Metronomy ou à l’ineffable Sébastien Tellier, la musique du natif de Saint Lô invoque tantôt la lascivité sur les brulants La Beauté Des Dieux et Leave Me Out, ou tantôt la sérénité sur les plus langoureux Wonderful Life et Up The Hill.
Avec cet excellent To Be Continued…, Tropical Mannschaft confirme donc aujourd’hui les espoirs entrevus sur son premier EP sorti en 2016, Make A Name For Yourself.
CLOCK STRETCHER – Walking On Shell (2019)
Trio parisien de pop-rock ciselé et inspiré, influencé, excusez du peu, par Radiohead et Alt-J, Clock Stretcher sort son second EP, Walking On Shell. Quatre titres à la mélancolie magnifique et à la puissance harmonique hors du commun, transcendés par la voix du maitre à penser Stanislas Micoud.
Après un premier EP déjà très réussi en 2017, First In The End, le combo francilien confirme aujourd’hui son immense talent.
KERRI WATT – Cut Me Loose (2019)
L’écossaise Kerri Watt, nouvelle égérie de l’indie-rock britannique, sort Cut Me Loose, single de rock abrupt et de vocalises félines.
Déjà remarquée par les médias spécialisés d’outre-Manche, notamment grâce aux excellents Long Way Home et The Wild, il ne reste plus aujourd’hui à la belle qu’à valider son talent sur la longueur d’un album pour pouvoir un jour prétendre au statut d’icône du rock.
FEET – English Weather (2019)
Avis de canicule sur la perfide Albion avec la power-pop rayonnante du dernier single des britanniques de Feet, English Weather.
Le titre fait pourtant référence au temps pluvieux qui est souvent la norme au royaume d’Angleterre. Rien de bien anormal me direz-vous, vu que le noisy-rock et le chant gouailleur de Jeep sur les autres singles du combo, notamment Outer Rim et Petty Thieving, font plutôt écho à la violence musicale des furieux Idles.
Pour l’instant projet potache de cinq universitaires de Coventry, il se pourrait bien que l’avenir de Feet s’écrive dans l’intense luminosité de la scène rock anglosaxonne.